Fernand KHNOPFF, peintre, dessinateur, graveur

Publié le par Le Syndicat des journalistes et écrivains

Fils d’un substitut du procureur du roi, Fernand Khnopff passa son enfance à Bruges. Ses parents l’imaginant mener une carrière de juriste, en 1875, il s’inscrivit à la faculté de droit de l’Université libre de Bruxelles. Mais ce fut sans passion qu’il suivit ses cours de droit. Il préférait lire des poètes, particulièrement Baudelaire et des romans de Flaubert. A cette époque, il fréquentait un groupe de jeunes écrivains belges dont Emile Verhaeren et Georges Rodenbach. En 1876, il s’inscrivit à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles. Une fois de plus, cependant, son tempérament  s’accommoda mal à un enseignement qui privilégiait l’académisme. Fernand Khnopff décida donc de poursuivre sa formation en visitant les musées et les galeries, notamment à Paris, où il s’intéressa à l’œuvre de Delacroix, Ingres ou Moreau. Des peintres anglais l’intéressèrent aussi, tels Millais et Burne-Jones. Fernand Khnopff était une personne d’un esprit empli de curiosité. Dans les années qui suivirent, il se rapprochera de Mallarmé et du Sâr Péladan, auteur mystique du Vice suprême et fondateur des salons de la Rose-Croix. Fernand Khnopff aurait pu être écrivain, car il se plaisait à inventer des phrases énigmatiques et des devises.

La démarche de Fernand Khnopff fut, nous le voyons, très singulière. Au début des années 1880, il séjourna, au cours des étés, à Fosset, un hameau  de la commune de Sainte-Ode, au cœur des Ardennes belges. Là, il peignit des paysages où s’affirme déjà son style si particulier. Au sein de cette nature paisible, où il n’y a pas de présence humaine, les arbres et les prairies sont comme nimbés d’un voile mélancolique. Dans les paysages de Fernand Khnopff nous voyons le ciel réduit à une bande étroite, qui ne laisse pas la place au soleil. Le temps semble suspendu, arrêté. A l’évidence, Fernand Khnopff rechercha des effets de peinture pour suggérer des transparences et des halos. La peinture, pour lui, n’est aucunement le miroir de la réalité. De cette façon,  il s’inscrivait dans la lignée du Symbolisme, ce courant qui privilégia l’alliance de l’imagination, du mystère et de la poésie.

Par la suite, avec ses portraits, Fernand Khnopff affirma cette orientation. Ses modèles furent des proches, et parmi eux sa sœur Marguerite. En 1887, il fit d’elle un portrait qui figure parmi les plus emblématiques du peintre. Il représenta sa sœur vêtue d’une longue robe blanche, serrée à la taille et le long du buste. La jeune femme détourne la tête, comme si elle souhaitait éviter le regard des spectateurs. Elle pose devant une porte tenant lieu de cadre. A sa gauche, sur le mur, est placé un disque d’or. A part ce curieux détail, nul décor. Il n’y aucun autre indice. Avec cette peinture, nous pouvons penser au peintre américain James Whistler, qu’admirait Khnopff, et particulièrement à sa Symphonie en blanc n°1, dite aussi La Fille en blanc. Cependant, Whistler enrichit sa composition d’éléments décoratifs et suggestifs, tandis que Khnopff refusa toute allusion.

En 1896, Fernand Khnopff réalisa un tableau montrant Œdipe tenant un spectre ailé, sa joue prenant appui contre la tête d’un sphinx, représentant les traits de Marguerite, le reste du corps étant celui d’un guépard. Cette scène est une véritable énigme. La composition est riche, et une sensualité invite à une rêverie. En suite, au fil du parcourt de l’exposition, nous découvrons les thématiques de Fernand Khnopff liées à la figure d’Hypnos. D’autre part, s’intéressant à la photographie, son  rôle est évidence dans l’œuvre du peintre, Khnopff l’utilisa de plusieurs manières. La photographie lui permit de capturer la pose de ses modèles, la photographie /image intervenant comme support de l’œuvre à venir.

Les diverses facettes de Fernand Khnopff, qui fut peintre, dessinateur et graveur nous sont proposées aujourd’hui : il y a quarante ans qu’une exposition importante du peintre fut montrée en France. Le merveilleux côtoie le rêve et l’indicible, mais Fernand Khnopff refusa toujours d’expliquer son art, peut-être pour nous laisser à notre propre rêverie et idéal. Nous regardons son travail qui ouvre sur un horizon sensible, où l’ombre côtoie la lumière, et une douceur à côté de la brutalité du monde.

Fernand Khnopff (1858-1921), Le maître de l’énigme – Musée du Petit-Palais, avenue Winston Churchill, 75008 Paris – www.museepetitpalais.fr – Ouvert du mardi au dimanche, de 10h à 18h ; nocturne le vendredi jusqu’à 21h – Jusqu’au 17 mars 2019

 

                                                                                                                    Didier Du Blé

Publié dans n° 360 - 1er tri 2019

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