UN FAUTEUIL POUR VOUS DISTRAIRE - CINEMA par Christian GREGOIRE

Publié le par Le Syndicat des journalistes et écrivains

En guerre, de Stéphane Brizé

Malgré de lourds sacrifices financiers de la part des salariés et un bénéfice record de leur entreprise, la direction de l’usine Perrin Industrie décide néanmoins de la fermeture totale du site. Accord bafoué, promesses non respectées, les 1 100 salariés, emmenés par leur porte-parole Laurent Amadéo, refusent cette décision brutale ; ils vont se battre contre la délocalisation et tout tenter pour sauver leur emploi.  Avec encore une fois un Vincent Lindon totalement investi dans son rôle au milieu d’une nuée d’acteurs amateurs, ouvriers ou cadres eux-mêmes, donc sans caricatures,  ce film démonte toutes les étapes, les méthodes, les engagements mais aussi les désaccords, d’un combat titanesque, et révèle qu’à force de brutalité sociale, on ne peut pas devenir autre chose qu’une personne en colère. Ou désabusée et dépressive. Ce fil social laisse un sentiment d’écœurement et d ’injustice, mais il est fort pour les consciences, d’une authenticité et d’une humanité incandescentes. 

Everybody knows, d’Asghar Farhadi

Laura revient dans son village natal en Espagne pour le mariage de sa sœur.  Elle  a fait le voyage avec ses deux enfants, mais sans son mari, Alejandro, resté à Buenos Aires pour son travail. Les retrouvailles avec la famille et Paco, l’ami de jeunesse, sont chaleureuses. Mais un drame terrible va toutefois  plomber la soirée. Pousser Alejandro à prendre le premier avion pour Madrid. Et contraindre chacun à faire face à ses responsabilités. Le réalisateur iranien montre comment un événement imprévu peut révéler à chacun ses failles intimes. Et comment en de telles circonstances, les non-dits, les secrets trop longtemps cachés, peuvent précipiter la crise. 

Los Adioses, de Natlai Beristain

Ce biopic délicat dépeint l’écrivaine Rosario Castellanos, monument de la littérature de son pays, symbole du féminisme dans toute l’Amérique Centrale. Mais de cet aura, le film n’en parle guère, Il s’attache à fuir l’histoire officielle pour créer un portrait intime.  Au milieu de ses sentiments et de ses relations quelquefois complexes,  l’héroïne mène une lutte acharnée pour s’affirmer femme, écrivaine, et mère ayant le droit de travailler. Un film délicat qui dépeint le combat et la vie de Rosario Castellanos dans les années 60 mais montre aussi une femme en proie à une réelle solitude.

Les anges portent du blanc, de Vivian Qu

Mia, employée d’hôtel dans une station balnéaire chinoise, détient une vidéo qui pourrait aider à prouver qu’un client fortuné a violé deux fillettes dans l’établissement. Pourtant, l’adolescente reste dans l’ombre, craignant des représailles. Et pour cause, la violence est omniprésente dans ce film ;   qu’elle soit directe ou plus insidieuse. Le récit est parfois d’une noirceur accablante, mais si l’on respire encore c’est grâce à Mia. Le parcours du combattant de ce formidable personnage l’emporte finalement sur le suspense entourant la libération de sa parole.

Le ciel étoilé au-dessus de ma tête, d’Ilan klipper

Ce film ressemble à huis-clos, dans le cadre pas très cadré d’une comédie loufoque. Le héros, Bruno, un écrivain quinquagénaire qui a connu le succès avec un premier roman, végète, depuis, dans un sombre trois-pièces partagé avec sa colocataire à tendance Femen. Brunon ne s’estime cependant pas si malheureux et ne comprend pas pourquoi  ses parents débarquent avec son ex-femme, un ami, et une psy chargée d’évaluer l’opportunité d’une hospitalisation forcée, ou d’un éventuel mariage, ce qui arrangerait tout le monde. Un mélange de réalité et de fantasmes dans ce film déjanté et drôle, et à la fin duquel on se demande, dans une société sens dessus dessous, qui sont vraiment les plus fous ?

 

Publié dans N° 357 - 2e Tri 2018

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