FELIX FENEON Co-FONDATEUR de LA REVUE INDEPENDANTE

Publié le par Le Syndicat des journalistes et écrivains

FELIX FÉNÉON (1861-1944)

CO-FONDATEUR de LA REVUE INDÉPENDANTE (période 1884-1895)

 

Ainsi que vous le savez, LA REVUE INDÉPENDANTE voit sa naissance en 1841, grâce à George SAND, Pierre LEROUX et Louis VIARDOT, qui sera éditée pendant plusieurs années.

S’ensuit une période de sommeil jusqu’en mai 1884 où LA REVUE INDÉPENDANTE (politique, littéraire et artistique) de format 12 x 18,5 cm, est reprise par Félix Fénéon, Rédacteur en chef, et Georges Chevrier (proche des mouvances théosophiques). Le premier numéro de cette seconde naissance s’ouvre sur 84 pages et son siège se trouve 7, rue de Médicis à Paris 6e. Sa périodicité est mensuelle.

La Revue Indépendante est essentiellement littéraire et artistique et donne la parole aux Symbolistes, aux Naturalistes comme Joris-Karl Huysmans, Edmond de Goncourt, Paul Verlaine… Peu à peu les anarchistes s’installent sous le règne présidentiel de Jules Grévy.

Félix Fénéon ouvre régulièrement les locaux de La Revue Indépendante à des expositions de gravures et de dessins. De novembre 1886 à décembre 1888, une édition de luxe reproduit des lithographies et des eaux-fortes de Georges Seurat, Whistler, Renoir, Jean-François Rafaëlli, Paul Signac, Camille Pissarro, Maximilien Luce… qui représentent le post-impressionnisme.

80 numéros sont édités jusqu’en avril 1885. Ensuite La Revue Indépendante devient bimensuelle et on note une interruption de juin 1885 à octobre 1886. Puis elle redevient mensuelle de novembre 1886 à juillet 1895. Son siège va emménager 79, rue Blanche à Paris 9e.  L’impression passe à 180 pages (1886-1895) avec quelques pages publicitaires. L’édition cesse en 1895 faute de crédits.

Bien longtemps après, en 1947, Robert Morche fera renaître La Revue Indépendante et c’est à ce moment-là que celle-ci devient l’organe de presse du Syndicat des Journalistes et Ecrivains. Mais là, c’est une autre histoire !...

 

Revenons à Félix Fénéon qui avait une personnalité peu commune. Sur un portrait dessiné à grands traits, on devine un homme rembruni, distant, et on le sait doté d’une forte intelligence. Il est éditeur, journaliste, critique d’art, marchand d’art averti, avec des activités politiques. A la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle, il amasse une collection surprenante en nombre et en diversité. Il est aussi un séducteur invétéré et est adoré de ses maîtresses. Il aura deux fils nés en 1893 et 1899.

Le néo-impressionnisme et les Arts premiers sont ses deux fers de lance. L’Art moderne le fascine.

Né à Turin le 22 juin 1861, il entre à l’Ecole normale de Cluny, s’intéresse à la politique et entame sa carrière de journaliste. Arrivé à Paris, il est reçu premier à un concours, est embauché comme rédacteur au ministère de la Guerre à Paris. Il devient vite un revuiste convaincu et signe de nombreux articles de son nom ou sous un pseudonyme. Ce sont La Revue Indépendante (qu’il fait renaître en 1884) et La Revue Blanche (teintée d’anarchisme) qui dominent la sphère littéraire.

En 1886, Fénéon publie (ce sera l’une de ses deux seules publications) une plaquette intitulée Les Impressionnistes en 1886. Parallèlement à ses talents littéraires, Félix Fénéon se montre un critique d’art averti ; il a collaboré avec Henri de Toulouse-Lautrec (1894-1901) à La Revue Blanche.

Profitant de la loi sur la liberté de la presse (1881), Félix Fénéon commence à s’investir corps et âme dans la création et l’animation de « petites revues » où « les poètes aiguisent leur plume et se révoltent envers l’académisme et le naturalisme dominants ». Il devient un phare dans le milieu littéraire, proche de Mallarmé, il favorise les œuvres d’Ibsen, Dostoïevsky, James Joyce.

En 1886, c’est à lui que revient l’honneur de baptiser sous le nom de néo-impressionnisme une nouvelle manière scientifique de peindre, fondée sur la division des tons.

En 1894, une vague d’attentats désigne les anarchistes comme en étant les auteurs (Procès des Trente). Félix Fénéon, inquiété, sera acquitté. Des artistes et écrivains, entre autres Stéphane Mallarmé, Octave Mirbeau, avaient pris sa défense.

Jusqu’en 1903, il exalte le symbolisme littéraire avec Gide, Jarry, Maeterlinck, Verhaeren, Strinberg. Parmi les peintres de cette époque, ses goûts le portent vers Bonnard, Vuillard, Vallotton…

En 1905, il acquiert ses premières œuvres africaines et c’est en 1906 qu’il devient le directeur artistique de la Galerie Bernheim-jeune : les futuristes et les Fauves en tiennent les cimaises. Il y fait exposer Cézanne, Seurat, Signac, Matisse, Henri-Edmond Cross, Bonnard, Vuillard, Kees Van Dongen, Raoul Dufy, Modigliani, le Douanier Rousseau…

En 1912, il s’intéresse aux peintres futuristes tels que Luigi Russolo, C .Carrà, F.T.Marinelli, U. Boccioni, G. Severini, G. Balla qui développent des lignes de force dans une pluie explosive de couleurs.

Il contribue très vite à la reconnaissance des arts extra-occidentaux et, en 1920, il sensibilise ses lecteurs aux Arts lointains (il préfère cette appellation à celle colonialiste d’Art nègre), se demandant si ceux-ci  pourraient entrer un jour au Louvre.

De 1906 à 1925, il fait exposer à la galerie Bernheim-jeune des œuvres de la génération post-impressionnistes : les Fauves, Picasso (qu’il n’apprécie pas), Modigliani et Utrillo.

Dans les années 1910, surtout en 1919, l’art africain accentuera sa reconnaissance. Félix Fénéon possède une collection très importante nommée « les arts lointains ». Lucie Cousturier saura l’influencer sur « l’émancipation des peuples colonisés ».

En 1923, Félix Fénéon prête au musée des Arts décoratifs 70 objets pour une exposition : De l’art indigène des Colonies d’Afrique et d’Océanie. Le 29 février 1924, Félix Fénéon cède un Seurat (Une baignade, Asnières) à Samuel Courtauld au profit de la National Gallery à Londres (présenté au Premier Salon des Indépendants). C’est la consécration pour Seurat.

Puis en 1935, il organise des prêts identiques pour le Museum of Modern Art (Moma) à New York.

Félix Fénéon poursuit en même temps ses chroniques, affichant un style précis sans concession (son second ouvrage publié Nouvelles en trois lignes définit assez bien le personnage) , épris de justice sociale (son engagement politique le poussera à défendre Dreyfus aux côtés de Zola, en 1894). Il soutient Paul Valéry, Apollinaire, Louis Laforgue. Il assure également des chroniques dans Le Figaro et Le Matin.

C’est en 1941 que Félix Fénéon se sépare d’une partie de ses acquisitions, ce qui lui rapporte la somme de six millions de Francs. Cette fortune ne l’empêche pas de vivre modestement.

Lors de cette vente à Drouot, se trouvaient des Chagall, Dufy, Pissarro, Seurat, Bonnard, Derain, Max Ernst.

Croquis de Félix Fénéon d'après Félix Vallotton

 

Félix Fénéon a édité des hommes devenus célèbres par la suite : De Mallarmé, Rimbaud à James Joyce en passant par Gide… C’était un homme altruiste. Il aidait les historiens par la communication de fiches et de photos. Les rencontres avec les artistes du monde littéraire et des arts lui créaient des liens indéfectibles.

Ses goûts éclectiques montraient Félix Fénéon comme un homme que n’arrêtaient pas les oppositions des techniques et des époques.

 

Ce dandy libertaire à barbichette de la vie parisienne, passeur et médiateur, meurt en 1944 à Chatenay-Malabry et est inhumé au Cimetière du Père Lachaise à Paris.

 

En 1947, trois ans après sa mort, une autre vente aux enchères  disperse des Seurat (chantre du divisionnisme ou du pointillisme), Braque, Renoir, Denis, Masson , Matisse et Dufy.

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Bibliographie :

Archives de LA REVUE INDÉPENDANTE

Nouvelles en trois lignes, de Félix Fénéon - Libretto

Beaux-Arts – Félix Fénéon (1861-1944) Les arts lointains

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Musée du Quai Branly Jacques Chirac

Mezzanine Est – jusqu’au 29 septembre 2019 – 37, quai Branly à Paris 7e

01 56 61 70 00 – www.quaibranly.fr

Mardi, mercredi, dimanche de 11 h à 19 h – jeudi, vendredi, samedi de 11 h à 21 h

Métro ligne 9, station Alma-Marceau (traverser le pont de l’Alma)

Plus tard (Musées d’Orsay et de l’Orangerie, Paris  et The Museum of Modern Art, New York)

 

LES TEMPS NOUVEAUX, de Seurat à Matisse : Musée de l’Orangerie à Paris

Du 16 octobre 2019 au 27 Janvier 2020

La Rédactrice en chef

 

Publié dans N° 362 - 3e Tri 2019

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